jeudi 13 octobre 2011

"Les Bien-Aimés", Christophe Honoré

Après des essais stylistiques tels que "Homme au bain" et "La belle personne", et l'ode à sa muse dans "Non ma fille tu n'iras pas danser", Christophe Honoré revient à ses premières (chansons d')amours en réunissant toute sa petite famille cinématographique, un casting devenu routinier mais fonctionnant toujours en tant qu'ensemble, et Alex Beaupain aux commandes pour les chansons de cette nouvelle comédie musicale moderne.


Une innovation notable est le déploiement spatio-temporel : loin de se limiter à une ville ("Dans Paris") ou à un arrondissement ("Les Chansons d'Amour"), "Les Bien-Aimés" navigue dans le temps et l'espace, explorant les difficultés amoureuses des années 1970 à aujourd'hui, en traversant Prague, Paris, Londres, Montréal et Reims... Cette évidente volonté d'universalité est cela dit quelque peu sclérosée par le schéma malheureusement très linéaire de la narration ; se permettre une fantaisie bienvenue aurait sans nul doute été soutenu par la multiplicité des acteurs. Cela n'empêche un plaisir indéniable face à ce voyage coloré à travers les époques et les pays.


C'est ainsi une poignée de personnages que l'on suit à travers les âges : Ludivine Sagnier offre une bien piètre performance, au terminus de la lignée de ses pauvres interprétations précédentes, et c'est d'autant plus visible dans la mesure où elle joue le même personnage que Catherine Deneuve - bien que le jeu figé de cette dernière confirme quelque peu cette triste idée qu'il est peut-être temps d'arrêter, malgré le plaisir que procure sa présence. Louis Garrel, de son côté, est égal à lui-même, dans un rôle créé encore une fois sur mesure par Christophe Honoré, et qui le conforte dans un territoire habituel sans étincelle. La surprise se trouve plutôt du côté de Chiara Mastroianni, qui, malgré un rôle là aussi bien similaire à ce qu'elle a fait par le passé avec le cinéaste, offre une interprétation riche, nuancée et profonde qui m'a réconcilié avec cette actrice qui ne me renvoyait que la froide image d'un jeu limité jusqu'alors. Elle apparaît comme celle qui passe le plus pour le personnage plutôt que pour l'actrice, malgré la mise en scène ostentatoire de son rapport avec Deneuve et l'obsession inquiétante d'Honoré de faire coucher ses personnages avec des garçons homosexuels.

Le propos était sans doute de mettre en relief les difficultés amoureuses invariables à travers les générations. Une impression d'immobilité frustrée et frustrante en découle donc mais le tout baigne dans une mélancolie assez magnifique, presque comparable aux "Chansons d'Amour", et qui marque par une réalisation assez léchée malgré quelques maladresses. Cela compense quelque peu le manque relatif de vraie intrigue. Les personnages se trouvent dans des situations où ils s'enferment et se définissent, l'exercice est intéressant mais parfois ennuyeux, d'autant plus à cause de la durée du long-métrage (plus de deux heures). Les différents événements historiques nourrissent l'histoire et glissent sur les personnages, offrant un regard intéressant sur l'effet qu'ils peuvent avoir sur une vie.


La forme retrouvée de la comédie musicale vient aussi quelques fois rompre cette faible monotonie, par des chansons souvent très plaisantes et bien écrites : Alex Beaupain effectue là encore un merveilleux travail de parolier. Dommage que la musique "clocloïsante" ne suive pas ; du côté des interprétations, il est évident que le but n'est pas d'enregistrer une chanson d'une qualité vocale irréprochable mais bien de servir le film, et cet objectif est souvent atteint. C'est avec plaisir que j'ai retrouvé certains morceaux après le film, avec surtout "Qui aimes-tu ?", "Ici Londres" ou encore "Puisque tu m'aimes", malheureusement coupée au montage, et l'hymne du film : "Je peux vivre sans toi"/"Je ne peux vivre sans t'aimer".


"Les Bien-Aimés" reste donc un film agréable, malgré une forme sclérosante car trop linéaire et un fond pas assez creusé. Il est clair que le digne successeur des "Chansons d'Amour" n'est pas encore arrivé, mais en l'attendant, "Les Bien-Aimés" propose une bonne distraction malgré son manque d'ambition que peinent à corriger les quelques nouveautés.

1 commentaire:

  1. Je crois que ce film est un révélateur : du mauvais jeu de quelques acteurs qui étaient attachant un temps, et qui deviennent agaçant ; du fait que la Deneuve commence à faire n'importe quoi (pour qui ? Pour quoi ? On aimerait bien le savoir) n'importe quel rôle (on l'a voit à peu prés 1000 fois en 4 mois dans un rôle de reine dans les derniers films qu'elle a tourné - et on ne dira rien sur son apparition dans le clip du Doré), Honoré tourne trop (il est beaucoup trop long ce film, il faut l'avouer. Et la BO laisse deviner qu'il était encore plus long à la base). Par contre l'histoire d'amour avec Michel Delpech, j'ai beaucoup aimé.

    RépondreSupprimer

Hé les copains, vous pouvez choisir l'option "Nom/URL" pour qu'on sache qui vous êtes. Comme ça si vous me faites des compliments je saurais à qui faire des bisous. Et si c'est des critiques je saurais qui rayer de ma vie. Paix amour bonheur!