"Attenberg" nous plonge sans attendre dans le quotidien grec de Marina, jeune femme de 23 ans qui travaille dur pour soutenir son père malade et qui, dans le même temps, essaie de contrer son asexualité en cherchant incessamment comment les autres peuvent bien s'y prendre.
Par une interprétation sans faute grâce à une direction solide, on s'attache assez rapidement au petit cortège de personnages qui gravitent autour de la touchante Marina : Bella, l'amie amusante, fidèle mais quelque peu nymphomane ; Spyros, l'attachant père en phase terminale de cancer qui essaie d'organiser comme il peut son grand départ ; et le patient ingénieur qui accepte plus ou moins d'être le cobaye de Marina dans ses expérimentations sentimentales.
Est alors dépeinte la vie extrêmement nonchalante d'une jeune Grecque indécise. L'exploit est de raconter cet ennui relatif sans en produire chez le spectateur. Au contraire, on suit avec intérêt l'immersion dans le quotidien de Marina : ses questionnements, ses jeux, ses essais, son parcours plus ou moins initiatique qui ne se réclame pourtant d'aucune prétention universelle. C'est un portrait à la fois personnel et parlant, d'une jeunesse à la fois sous contrôle et à la dérive, d'une langueur comblée, d'une grisaille coloriée. A travers le regard morne de la jeune fille sont passées en revue les questions de l'amour, du sexe, de l'intimité, des relations sociales : amicale, amoureuse, familiale. Une sorte d'avancée vers l'âge adulte sans trop s'en soucier, comme une tâche à accomplir. Quand Marina doit soudain prendre de grandes décisions, elle fait son choix sans trop hésiter mais avec mélancolie.
Tout cela passe par une mise en scène intrigante et originale, pour le moins : les scènes alternent notamment avec des passages de jeux entre les deux amies, qui sautillent en rythme dans une chorégraphie étrange, ou alors se racontent leurs rêves les plus perturbants. Cette réalisation résolument underground est parfois too much, pour faire dans l'anglicisme : Tsangari cherche un peu trop l'absurde pour qu'il le soit vraiment, revendique un peu trop l'originalité pour qu'elle soit authentique. Mais l'esthétisme est là, et le résultat reste intéressant, onirique et doux. De plus, ces petits intermèdes ne rendront que plus vif le récit, rendant d'autant plus marquants les événements narrés.
C'est donc en fait une sorte d’œuvre de Xavier Dolan à la grecque qui est livrée ici : un récit concis et simple, un portrait touchant et nonchalant, un esthétisme sans autre faille qu'un léger côté ostentatoire. "Attenberg" apparaît quelque part entre l'expérience sociale, à la fois nationale et intime, et l'expérimentation artistique. Le résultat est loin d'être déplaisant.
A certains moments on voit un peu trop la ficelle du " je veux faire bizarre, comme ça je vais avoir un prix à Cannes". C'est bien tenté - parfois - mais je crois que le film manque globalement de cohérence. (oui, oui, j'ai dit ça uniquement parce que je ne savais pas comment finir ma phrase brillamment commencée). Autrement c'est tout à fait intéréssant (toujours la même chose) c'est un film d'auteur populaire (oui, oui!) qui redonne ses lettres de noblesse à un genre jusque là négligé par l'intelligentsia parisienne. (bouquet final)
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