dimanche 12 mai 2013

"L’Écume des Jours", Michel Gondry

Bon, c'est que, bon, comme vous êtes toujours aussi nombreux à venir en ces lieux alors même que, bon, ils sont, bon, silencieux depuis, bon, assez longtemps, je me sens un peu, bon, votre obligé, et je vais enfin écrire la critique du dernier Gondry. La vie a été un peu compliquée ces temps-ci, alors j'ai dû délaisser le cinéma et le blog. Mais j'y reviendrai dès que j'aurai plus de temps. En attendant, je suis allé, le soir de la première, s'il vous plaît, voir le fameux et attendu dernier Gondry, avec deux fangirls inconditionnelles.


Le concept, on le connaît : "L’Écume des Jours", chef-d’œuvre de poésie et d'absurde par Boris Vian, adapté par Michel Gondry, roi du saugrenu cinématographique. Et, choix critiqué, il réunit à cette fin les deux acteurs à la pire diction du PAF, j'ai nommé Romain Duris et Audrey Tautou. En réalité, si leur performance n'atteint pas des sommets car elle souffre parfois d'un côté un peu clinquant sans doute voulu par la direction, elle sera satisfaisante. On se souviendra davantage de certains des rôles secondaires : Gad Elmaleh, contre toute attente, s'en sort assez bien, et Aïssa Maïga fait mouche une fois de plus. Les autres apparitions, en forme de clins d’œil, ont un résultat variable : le cameo de Gondry lui-même peine à convaincre, et le casting d'Omar Sy ressemble davantage à un argument marketting tant il se confine encore et toujours aux mêmes pitreries.


Sur eux tous repose cela dit la tâche ardue de porter l'univers extravagant du film, mais ils se feront rapidement phagocyter par l'immensité de celui-ci. Et c'est là que réside tout l'échec du long-métrage : l'esprit de Gondry et l'esprit de Vian étaient sans doute similaires dans la créativité, et on eût pu s'attendre à ce que leur adjonction fonctionne à merveille, mais il n'en est rien. Leur alliance n'est en aucun cas synergique ; au contraire, leurs effets s'accumulent ad nauseam, ils surenchérissent sans fonctionner. Cela est sans doute aussi dû aux libertés matérielles soudain accordées à Gondry, et dont celui-ci s'enivre : les trouvailles poétiques qui font toute la patte de l'artiste sont démultipliées à l'infini, sans qu'on ait le temps de les apprécier, et jusqu'à ce que, très rapidement, on soit fatigué de cette overdose forcée. Et, qui plus est, cette opulence leur fait perdre le côté bricolé-système-B qui faisait tout leur charme. Le spectateur est contraint d'accepter ces absurdités dénaturées, simplement parce qu'elle sont signées Gondry. En fait, avec ce film, le réalisateur semble  formater ce qui faisait son originalité. Mais à quel prix...



Au-delà de ces aspects, en fouillant bien au travers du vacarme assourdissant des montagnes de la mise en scène, on trouve tout de même l'histoire de Vian. Et, si le fait que ce soit là la meilleure qualité du film prouve que l'adaptation en est ratée, il s'avère que cela sauvera le long-métrage. Les émotions, pures et simples, y sont. On peut donc découvrir la puissance symbolique des idées narratives de l'écrivain, la poésie incontestable de son histoire, la douce virulence des critiques qu'il y formule et la tragédie réaliste encore mieux soulignée par le côté fantastique du récit. En cela, "L’Écume des Jours" de Gondry reste un écrin à celle de Vian : elle ne la porte pas, elle ne la sublime pas, elle a juste l'honneur de la mettre en lumière. Et l'on s'en contente.


Enfin bon, pour résumer, et comme le dit mieux que moi M.V., "c'est trop mimi mais bon..." (avis à compléter par l'intéressée).