dimanche 18 novembre 2012

"Amour", Michael Hanneke

Dans son film primé de la Palme d'Or au Festival de Cannes (toutes ces majuscules font tellement sérieux, on se croirait dans Télérama), Michael Hanneke se concentre sur un couple d'octogénaires cultivés que la maladie frappe, dérange et disloque. 


Le thème est donc délicat, voire franchement casse-gueule, on n'aura qu'à demander à Valérie Donzelli. Les risques ? Le larmoiement, l’apitoiement, l'atermoiement et autres mots en -oiement qui ne sont jamais bon présage. Mais Hanneke, hormis quelques rares moments qui s'apparentent à une torture malvenue du spectateur, parvient quasiment à les contourner, par une mise en scène ingénieuse et surtout par le titre de son film, ce titre orgueilleux qui transcende le sens du film et l'éclaire de son jour d'une complexe simplicité. Le vrai sujet, ce sera donc l'amour, cet amour presque séculaire qui unit les deux personnages et qui justifiera chaque scène, de la brève inclusion au long plan-séquence. Cette relation qui ne pâlit pas, qui se replie sur elle-même dans l'adversité, et qui explose en un final cruel, aussi inévitable que parfait.


Cet adversaire, c'est la maladie : celle qui lentement vient détruire la cognition du personnage de l'incroyablement crédible Emmanuelle Riva, dans un réalisme confirmé, face aux yeux horrifiés de la-toujours-excellente Isabelle Huppert, et à ceux fatigués du personnage de Jean-Louis Trintignant. Face à cette inexorable décrépitude, le contraste se voudra appuyé par une direction précise et précieuse, teintant les dialogues du début d'un ton bourgeois presque théâtral, qui ne peut s'empêcher de gréver un tant soit peu la crédibilité du couple, et de sonner comme un élitisme à la tragédie grecque. Mais au fil des images, à travers un rythme molletonné, confiné dans un irrespirable huis-clos, l'horreur de la maladie n'en paraîtra que plus vive.


Évidemment, la réalisation est somptueuse, alliant une image nettement dessinée à des plans d'une poésie subtile et des plans-séquences d'une réussite indicible, maîtrisant toute l'ampleur de son sujet par un style à la fois direct et patient. Cela permet à Hanneke de dresser aussi le portrait d'une vieillesse acceptée, d'un contrôle palliatif, d'un dévouement évident, pour parvenir à l'essence de la description pure de l'affection, dans tous les sens du terme. Un moment de cinéma qui, s'il flirte avec la prétention par moments, ne peut qu'inspirer le respect, aussi bien par sa forme que par son fond.

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