J'aime bien Gus Van Sant. Voilà. J'ai vu que "Elephant" était grandiose, j'ai trouvé que "Paranoid Park" était magnifique, j'ai toujours entendu mon frère et ma sœur dresser des louanges de "Good Will Hunting". Ainsi, même si je ne sais jamais vraiment trop comment prononcer son nom, et qu'il ne m'est ainsi d'aucune aide lors des soirées mondaines, j'aime bien Gus Van Sant. "Restless" est son nouveau film. Mais ça, je ne l'ai su qu'en rentrant chez moi après la séance de cinéma.
En conséquence, évidemment, j'ai tout de suite mieux compris pourquoi j'avais tant aimé la réalisation. C'était une expérience amusante et intéressante, en fait, de partir sans a priori et d'avoir la confirmation que j'aimais les films de Gus Van Sant. Pendant tout le film, je me suis dit que cette réalisatrice (oui, dans ma tête, c'était une femme) (sûrement son côté pédé qui ressort) avait une façon de voir les choses qui me plaisait et qui me touchait. Et moi qui suis allé voir ce film le lendemain du visionnage de sa bande-annonce, sans aucune autre information, j'ai pu retomber amoureux, cette fois objectivement.
Cela avait peut-être à voir avec le fait que j'ai vu ce film le jour suivant la séance de "La guerre est déclarée". Comme vous l'aviez compris puisque vous êtes des lecteurs fidèles et attentifs, je n'ai pas adoré le film de Valérie Donzelli, trop personnel et sûrement réalisé trop tôt, à s'embrouiller les pinceaux dans un accouchement forcé et prématuré. "Restless" parle en quelque sorte du même thème : la maladie chez quelqu'un qui est supposément trop jeune pour partir. C'est d'ailleurs la même affection qui touche les malades des deux films, mais la comparaison s'arrête là.
En effet, si "La guerre est déclarée" dressait un portrait intéressant et réussi de la vie hospitalière par le point de vue des patients et des parents de patients, dans "Restless", l'aspect médical est totalement évacué. Le passage d'annonce des derniers résultats est réduit à un enchaînement de séquences de quelques secondes, et ensuite, les rares scènes à l'hôpital servent uniquement la relation intime qui se crée entre Enoch et Annabel. (En plus, entre nous, c'est des noms qui tuent, ça.) La maladie pointe dans des moments inattendus, apportant un réalisme troublant, mais elle est acceptée, il n'y a plus rien à faire, la médecine a trouvé ses limites, mais ce n'est pas trop grave, semble nous dire le film, alors, n'en parlons pas, regardons la vie plutôt que la mort. D'accord, formulé comme ça, ça paraît un peu niais et réchauffé.
Pourtant, en fait, le film dessine sans tomber dans les clichés des personnages profonds et originaux, qui se lient d'une façon indescriptible mais brillamment décrite. Ainsi, s'ils évoluent dans un univers presque fantastique, avec Enoch vivant dans un manoir hitchockien, leurs jeux de rôles d'adolescents, et l'intriguant personnage d'Hiroshi entre la réalité et l'imaginaire, ça ne semble pas importer, parce que tout gravite surtout autour de cette relation amoureuse à la fois banale et particulière. Mia Wasikowska, éthérée et profonde, brille en beauté androgyne, rappelant souvent Dakota Blue Richards, et éclaire Henry Hopper, dans un duo justement choisi apportant un naturel dans l'interprétation parfaitement adapté au sujet.
Ainsi l'émotion perce sans difficulté et sans faux-semblant à travers les images travaillées à la photographie tiède de Gus Van Sant, un scénario enchaînant sans la moindre longueur les questions, les développements et les réponses, et des dialogues magnifiques exploitant toute relation avec soin et intelligence. "Restless" a des airs d'automne, des odeurs de printemps, des mots d'hiver et un sourire d'été, amenant un ensemble parfaitement pur.
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