Il y a des jours où on a de la chance. Personnellement, quand je me suis retrouvé par hasard connecté sur Facebook (ce qui est un événement somme toute fort rare, vous en conviendrez au vu de l'espacement interminable entre mes interventions virtuelles sur réseau social) au moment même où était annoncée la mise en vente à la seconde des places pour Lille de cette tournée attendue, je n'ai pas hésité. Et je me suis retrouvé affublé de la place 1, rang 1. Celle-là même qui est devant le micro, au majestueux théâtre Sébastopol de Lille. Je me suis donc empressé de raconter cette histoire encore et toujours, chaque jour, à tout le monde parce que, sincèrement, c'est juste trop la classe, quoi.
Il est de ces artistes que l'on suit les yeux fermés. Ceux dont on achète (oui, oui!) les CD (oui, oui! le disque est irremplaçable) et les places de concert sans se poser de questions. J'en reparlerai sans doute la fois prochaine d'ailleurs. (Spoilers!). Et Feist en fait indéniablement partie.
J'avais déjà vu Feist en concert à l'Aéronef, il y a quelques années, pour sa tournée précédente. J'avais été marqué par la recherche artistique évidente sur scène. Puisque je n'ai pas attendu Assurément pour donner mon grain de sel, j'avais alors écrit : "On est dans le spectacle, c'est là toute la différence. Loin des grosses instrumentations tagadatsouintsouin, Feist préfère une intimité liée à une technique parfaite.". Feist refusait tout formatage de la musique, s'amusait à triturer les morceaux les plus connus, à réinstrumenter les autres, tout en soignant le visuel pour aboutir à un authentique spectacle artistique et musical, ce qui, on s'en rend alors compte, est tout compte fait beaucoup plus rare que ce que l'on peut croire.
Ainsi, Feist, Sébastopol, première place, et pour Metals en plus = quadruple Banana Split toi-même tu sais.
La première partie était constituée de M. Ward, seul sur scène. Virtuose de la guitare, il commence son set par un morceau uniquement instrumental. Il charme ainsi le public par ses mélodies douces et sombres, parfaitement maîtrisées et exécutées. Ce n'est qu'à la deuxième chanson que sa voix surgit : elle est grave, rocailleuse, profonde. Ses chansons ressemblent à un road trip, où on chanterait du blues à la guitare, lors des voyages de nuit. Sur scène, il pose l'ambiance et prépare le public, avec son naturel déconcertant. Le choix de M. Ward par Feist semblera évident, tant il est cohérent avec le reste du concert : c'est un musicien, un vrai, qui vient faire de la musique, de la vraie.
Dans le genre invité bien choisi, il y a aussi Mountain Man. Trio de jeunes femmes qui chantent a capella, ce groupe propose des chansons sereines et bucoliques, dans la veine de Moriarty. Feist les emploie pour cette tournée en tant que choristes. Ensemble, elles scanderont les paroles et les rythmes, et entonneront même une de leurs propres chansons au milieu du concert. Leur côté décalé est à la fois attirant et quelque peu rebutant face à leurs visages souvent fermés et leur manque de communication avec le public. Mais quand la musique est douce...
Mais parlons du cœur du sujet : Feist. Toujours aussi jolie, elle est arrivée vêtue d'une robe tendance médiévale, et commence sans plus tarder avec l'approprié "Undiscovered First". Cette chanson fait partie des grandes favorites de l'album pour beaucoup de monde ; pour ma part, je n'avais jamais vraiment accroché autant que ça, jusqu'à cette version live qui sublime la chanson, la rendant plus puissante que jamais. C'est en fait tout "Metals" qui sera interprété lors de ce concert. Si on retrouvera avec joie les brillamment adaptés "A Commotion", "Comfort Me", "Graveyard" ou "The Bad in Each Other", dont la puissance sémantique et rythmique est magnifiée par la scène, celle-ci donne une nouvelle lumière à d'autres morceaux, tels que "Bittersweet Melodies" ou "The Circle Married the Line", dont la mélodie restera gravée dans toutes les têtes pour des semaines à venir. Pour l'exquis "Cicadas & Gulls", Feist et Mountain Man viennent tout au devant de la scène (à vingt centimètres de votre serviteur, donc, si vous avez bien suivi) et chantent acapella, sans micro, cette berceuse relaxante. Et très vite on comprend l'importance de chanter l'album dans son intégralité : c'est chaque morceau qui en fait la force, du single "How Come You Never Go There" aux chants moins mis en avants comme "Anti-Pioneer".
Et quand vient le moment d'interpréter de nouveaux morceaux, c'est "Metals" qui en donne la couleur et le ton. Les chansons sont totalement réorchestrées en cette direction, Feist s'en amuse et les tourne dans tous les sens : on découvrira un "My Moon, My Man" totalement électro, un "I Feel It All" plus enthousiasmant que jamais ou encore un "Mushaboom" tellement remixé que le mot principal du refrain n'apparaît plus ! La recherche musicale est ainsi encore plus présente lorsque Feist prend des libertés. Le tout se déroule devant un grand écran où sont projetés des vidéos ou des collages appropriés à chaque morceau, ou encore des images en direct des musiciens ou de la chanteuse. Le visuel est donc toujours aussi soigné, même si un peu plus de diversité aurait été appréciée à ce niveau.
Le défi était surtout de retranscrire sur scène la rythmique si particulière de l'album, à la fois brutale et hypnotique ; Feist et ses musiciens le relèvent avec brio. La scène ajoute même encore plus de violence aux beats de "Metals", alors que ceux-ci sont tapés à l'unisson par l'ensemble du groupe. Chaque musicien frappe à un moment distinct, et à eux tous, la mélodie se forme et apparaît, par cet ensemble synchrone et travaillé. La transe musicale s'en suit ! Et elle est aussi aidée par l'orchestration fidèle : le clavier, les cordes et le reste concourent vers une qualité musicale peu commune. Les chœurs apparaissent primordiaux dans cet album où ils sont omniprésents, et soutiennent autant la voix que l'instrumentation. L'équipe de Feist est très talentueuse, et la musique qu'ils produisent a cette teinte particulière, cette fois encore, de la vraie recherche artistique.
Quant à Feist elle-même, elle apparaît un peu timorée au début, et puis se lâche de plus en plus pour parler franglais entre les chansons : "Now that I've decided it's okay to talk, I'm gonna be doing it all night!". En effet : son humour n'a d'égal que sa spontanéité, et se dresse devant nous cette femme entre la chanteuse espiègle qui taquine public et musiciens, et l'artiste concentrée à la voix pure et juste, à l'image de son spectacle. Car à la fin du concert, on s'étonnera soudain de ne pas avoir entendu le morceau le plus connu de Feist, "1234", celui que tout le monde attendait sur la tournée précédente (et souvent le seul qu'ils semblaient connaître...). Feist l'a omis volontairement : sans doute ne trouvait-il pas sa place dans le cadre de "Metals", et elle n'est certainement pas du genre à faire un show où elle forcerait la présence de son tube. C'est sans doute ce qui est le plus beau dans les concerts de Feist : cette envie de faire de l'art avant de faire du spectacle, une envie qui est si bien réalisée que c'est son art qui devient spectaculaire.
Il y a des jours où on a de la chance, donc.
Il est de ces artistes que l'on suit les yeux fermés. Ceux dont on achète (oui, oui!) les CD (oui, oui! le disque est irremplaçable) et les places de concert sans se poser de questions. J'en reparlerai sans doute la fois prochaine d'ailleurs. (Spoilers!). Et Feist en fait indéniablement partie.
J'avais déjà vu Feist en concert à l'Aéronef, il y a quelques années, pour sa tournée précédente. J'avais été marqué par la recherche artistique évidente sur scène. Puisque je n'ai pas attendu Assurément pour donner mon grain de sel, j'avais alors écrit : "On est dans le spectacle, c'est là toute la différence. Loin des grosses instrumentations tagadatsouintsouin, Feist préfère une intimité liée à une technique parfaite.". Feist refusait tout formatage de la musique, s'amusait à triturer les morceaux les plus connus, à réinstrumenter les autres, tout en soignant le visuel pour aboutir à un authentique spectacle artistique et musical, ce qui, on s'en rend alors compte, est tout compte fait beaucoup plus rare que ce que l'on peut croire.
Ainsi, Feist, Sébastopol, première place, et pour Metals en plus = quadruple Banana Split toi-même tu sais.
La première partie était constituée de M. Ward, seul sur scène. Virtuose de la guitare, il commence son set par un morceau uniquement instrumental. Il charme ainsi le public par ses mélodies douces et sombres, parfaitement maîtrisées et exécutées. Ce n'est qu'à la deuxième chanson que sa voix surgit : elle est grave, rocailleuse, profonde. Ses chansons ressemblent à un road trip, où on chanterait du blues à la guitare, lors des voyages de nuit. Sur scène, il pose l'ambiance et prépare le public, avec son naturel déconcertant. Le choix de M. Ward par Feist semblera évident, tant il est cohérent avec le reste du concert : c'est un musicien, un vrai, qui vient faire de la musique, de la vraie.
Dans le genre invité bien choisi, il y a aussi Mountain Man. Trio de jeunes femmes qui chantent a capella, ce groupe propose des chansons sereines et bucoliques, dans la veine de Moriarty. Feist les emploie pour cette tournée en tant que choristes. Ensemble, elles scanderont les paroles et les rythmes, et entonneront même une de leurs propres chansons au milieu du concert. Leur côté décalé est à la fois attirant et quelque peu rebutant face à leurs visages souvent fermés et leur manque de communication avec le public. Mais quand la musique est douce...
Mais parlons du cœur du sujet : Feist. Toujours aussi jolie, elle est arrivée vêtue d'une robe tendance médiévale, et commence sans plus tarder avec l'approprié "Undiscovered First". Cette chanson fait partie des grandes favorites de l'album pour beaucoup de monde ; pour ma part, je n'avais jamais vraiment accroché autant que ça, jusqu'à cette version live qui sublime la chanson, la rendant plus puissante que jamais. C'est en fait tout "Metals" qui sera interprété lors de ce concert. Si on retrouvera avec joie les brillamment adaptés "A Commotion", "Comfort Me", "Graveyard" ou "The Bad in Each Other", dont la puissance sémantique et rythmique est magnifiée par la scène, celle-ci donne une nouvelle lumière à d'autres morceaux, tels que "Bittersweet Melodies" ou "The Circle Married the Line", dont la mélodie restera gravée dans toutes les têtes pour des semaines à venir. Pour l'exquis "Cicadas & Gulls", Feist et Mountain Man viennent tout au devant de la scène (à vingt centimètres de votre serviteur, donc, si vous avez bien suivi) et chantent acapella, sans micro, cette berceuse relaxante. Et très vite on comprend l'importance de chanter l'album dans son intégralité : c'est chaque morceau qui en fait la force, du single "How Come You Never Go There" aux chants moins mis en avants comme "Anti-Pioneer".
Quant à Feist elle-même, elle apparaît un peu timorée au début, et puis se lâche de plus en plus pour parler franglais entre les chansons : "Now that I've decided it's okay to talk, I'm gonna be doing it all night!". En effet : son humour n'a d'égal que sa spontanéité, et se dresse devant nous cette femme entre la chanteuse espiègle qui taquine public et musiciens, et l'artiste concentrée à la voix pure et juste, à l'image de son spectacle. Car à la fin du concert, on s'étonnera soudain de ne pas avoir entendu le morceau le plus connu de Feist, "1234", celui que tout le monde attendait sur la tournée précédente (et souvent le seul qu'ils semblaient connaître...). Feist l'a omis volontairement : sans doute ne trouvait-il pas sa place dans le cadre de "Metals", et elle n'est certainement pas du genre à faire un show où elle forcerait la présence de son tube. C'est sans doute ce qui est le plus beau dans les concerts de Feist : cette envie de faire de l'art avant de faire du spectacle, une envie qui est si bien réalisée que c'est son art qui devient spectaculaire.
Il y a des jours où on a de la chance, donc.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Hé les copains, vous pouvez choisir l'option "Nom/URL" pour qu'on sache qui vous êtes. Comme ça si vous me faites des compliments je saurais à qui faire des bisous. Et si c'est des critiques je saurais qui rayer de ma vie. Paix amour bonheur!