samedi 21 avril 2012

"Bye Bye Blondie", Virginie Despentes

Virginie Despentes adapte ici son livre du même nom, à une différence notable près : l'histoire d'amour sera désormais lesbienne. Elle qui revendique une visibilité plus juste pour les lesbiennes au cinéma, voit son nouveau film tomber à pic, entre "En Secret" et "Les Adieux à la Reine". En castant Emmanuelle Béart et Béatrice Dalle dans les rôles principaux, elle choisit de donner une tendance punk à son long-métrage.


Il y a assurément quelque chose de punk rock dans "Bye Bye Blondie". On apprécie ce léger vent de folie, cette saine rébellion, cette sorte de réalisme (bien que je ne doute pas que de vrais punks trouveraient à me contre-dire sur ce point, puisque je ne m'y connais que peu, finalement) dans une dynamique sincèrement affublée de toutes ses aspérités et tous ses aspects les plus viscéraux. Tout cela souffle sur l'intégralité du long-métrage, et on imagine aisément une Despentes exprimant ici sa propre irrévérence, quitte à surfer facilement sur les envies toujours réprimées de révolte de son public. Ainsi Stéphanie Sokolinski sera-t-elle fascinante en punk jamais aseptisée, et restera peut-être, à la fin, l'actrice qui marquera le plus ; et le film lui-même saura assumer son propos jusqu'au bout, en imprimant (au moins dans son récit) un refus de toute injuste autorité et de tout politiquement correct mal venu.


Est par ailleurs choisi le mode de narration chouchou des films des années 2010, dirait-on : l'alternance entre deux périodes. D'abord, celle d'hier, où Frances et Gloria se rencontrent et vivent une histoire d'amour adolescente puissante et tragique ; puis, celle d'aujourd'hui, vingt ans plus tard, quand Frances, désormais célèbre journaliste, vient retrouver Gloria et l'invite à vivre avec elle dans son monde parisien bourgeois. L'amour d'été est joliment retranscrit : il bénéficiera d'une photographie vive et claire, d'une réalisation intelligente et limpide, et d'une histoire sincère, juste et touchante, parsemée avec intelligence de détails drôles ou sensibles. A travers elle, de nombreux thèmes sont traités, sans les effleurer ni trop s'y épancher : l'incompréhension parentale, la découverte de la sexualité, la mouvance punk, ses envies et la vision dont elle souffre par la population, l'institutionnalisation psychiatrique, l'insouciance de la jeunesse... Aussi le récit sera-t-il rythmé, intéressant et réussira même à captiver, comme les histoires simples savent le faire uniquement lorsqu'elles sont bien racontées.


Du côté du présent, c'est un peu moins glorieux. Une fois passées les retrouvailles qui se font avec une rapidité déconcertante, on se demande vite où le film veut en venir. Si l'histoire est là aussi globalement simple, elle est sûrement moins bien racontée, tant elle peine à passionner. On ne comprend ni l'enjeu ni l'intérêt, on ne voit pas le problème ni ce que le film veut dire, hormis ce décalage de modes de vie, évident et peu creusé. Et ce n'est pas parce que l'on s'attache parallèlement aux héroïnes adolescentes, que l'on peut accéder à leur relation adulte, parachutée là sans construction préalable. La relation, qui fait le cœur du film, est en effet mal définie : tout ce qu'on en voit, malgré de belles scènes de tendresse ou d'accrochage, n'entre pas assez ni dans la complexité ni dans les sentiments. Ajoutons à cela le personnage détestable et cliché de Claude, interprété tant bien que mal par Pascal Greggory, et un essoufflement progressif général qui saura heureusement se regonfler lors d'une fin évidente mais bien sentie.


Restent alors les actrices : le film se veut résolument féminin, mais la direction pêche, de manière très surprenante et décevante. Les actrices se retrouveront alors à alterner entre justesse et cabotinage : Emmanuelle Béart impressionnera lors des scènes de colère mais ennuiera le reste du temps, Clara Ponsot souffrira de cette direction hésitante qui lui fera délivrer ses répliques de manière artificielle, et Béatrice Dalle sera réduite à une irrémédiable image de bulldog vulgaire. "Bye Bye Blondie" semble alors se perdre dans son propos et prend parfois les traits d'un produit résolument bobo, contemplatif et prétentieux. Cependant, au total, il s'extirpe de justesse de ce gouffre, en laissant le souvenir d'une histoire assez juste, jolie et simple, et qui, si elle aurait pu être creusée et exploitée davantage, reste intéressante et, avec ses propres moyens, élève tout de même le film quelque part, bien qu'on ne sache jamais trop où.



1 commentaire:

Hé les copains, vous pouvez choisir l'option "Nom/URL" pour qu'on sache qui vous êtes. Comme ça si vous me faites des compliments je saurais à qui faire des bisous. Et si c'est des critiques je saurais qui rayer de ma vie. Paix amour bonheur!