lundi 29 octobre 2012

"The We And The I", Michel Gondry

Dans son nouveau film, beaucoup moins promu que les précédents, Gondry s'attache à un bus de banlieue new-yorkaise, le dernier jour d'école de lycéens qui vont se déchirer, se chercher, s'attirer, vivre comme toujours. 


Le piège de ce huis-clos mobile résiderait dans la claustrophobie qu'il induirait, mais le véhicule se trouve tellement empli de vie et de portraits variés, qu'il en paraît gigantesque et seulement rarement étouffant. Et alors, à travers trois parties découpées de façon un peu superflue dans le long-métrage, les arrêts du bus accordent une bouffée d'air, aux spectateurs comme aux personnages. Car c'est là tout le concept alléchant du film : montrer, à travers les descentes successives des lycéens et la déconstruction progressive des castes qu'ils constituent, comme l'effet de groupe se dissipe pour dévoiler des individus de plus en plus sincères. L'idée était prometteuse, et elle est bien exploitée, au moins partiellement. A travers ce casting choral, il est effectivement regrettable de s'arrêter sur certains personnages tout en se débarrassant soudain d'autres au potentiel au moins tout aussi important. Ce faisant, Gondry grève un peu son projet et semble ne pas tirer parfaitement profit de son synopsis passionnant qui aurait pu disséquer encore plus la pierre angulaire de la vie lycéenne que constitue ce besoin d'appartenance au groupe.


Cela n'empêche en rien, évidemment, une succession de bons moments, alors qu'ils alternent à une vitesse vertigineuse entre humour, chagrin et cruauté. Ce rythme se fait de plus en plus effréné, jusqu'à se heurter aux limites et aux conséquences de la méchanceté généralisée de l'univers où sont obligés d'évoluer autant d'adolescents à la fois prisonniers et tortionnaires. On se retrouve alors face au vrai visage d'un monde sans cesse chahutant, sans cesse criant fort pour que l'on ne remarque pas ses faiblesses : l'analyse est aussi percutante que véridique. Dans cet enfer, en impeccable synchronisation avec les personnages, on se raccroche aux quelques bulles d'espoir disséminées de part et d'autre du film, notamment la touchante relation entre Teresa, personnage parmi les plus touchants, et la conductrice du bus, ou encore les dialogues, certes écrits, mais réalistes jusqu'à l'obsession.


Gondry saura aussi rappeler sa patte par petites touches absurdes en carton-pâte, mais ces inclusions forcées ne feront qu'exacerber le sentiment que ce que l'on a appris à aimer dans son cinéma est absent de ce film, dont le manque de folie se fait ressentir. Si son ambition était méritoire, "The We And The I" semble se perdre dans les méandres de la torturée psychologie adolescente, et peiner à extirper des scènes violemment puissantes dans ce magma de bruit et d'agitation. Malgré ces hésitations, on se souviendra de ce petit film du grand Gondry comme un joli exercice de style qui réussit pleinement à nous replonger, à corps et à cris, dans l'horreur lycéenne.


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